Rémanences Vénitiennes
À Venise, tout semble déjà double.
Les façades se mirent dans l’eau, les pas se perdent dans les ruelles, les visages derrière les masques.
En hiver, sous la brume, la ville paraît se dissoudre dans sa propre image.
Un jour, une chute accidentelle de mon sac a mêlé les pellicules exposées et vierges.
À mon retour, les images révélées présentaient d’étranges surimpressions : fragments de rues et de visages, canaux et plafonds d’églises, gondoles et tableaux anciens.
J’ai décidé de prolonger cette erreur, de travailler consciemment cette confusion.
Chaque photo devient une superposition de mémoire et de présent, un entre-deux où les architectures anciennes s’enchevêtrent avec leurs reflets, les lumières et les ombres, comme si la ville elle-même laissait apparaître ses fantômes.
Venise n’y est plus seulement photographiée, elle persiste, comme une trace de lumière qui s’attarde.
Une Venise rémanente, suspendue entre oubli et souvenir.